Lentement, mes yeux s’ouvrent. Je cligne un moment des paupières. La lumière m’aveugle et je referme aussitôt mes yeux. Près de moi, je sens une présence. Celle-ci se rapproche et ma main et soudainement enveloppée de chaleur. Qu’est-ce?
Je décide de me réveiller pour de bon et ouvre les yeux. Je fixe d’abord le plafond, blanc, puis les murs, tout aussi immaculés. Finalement, je tourne la tête vers la source de chaleur. Une jeune fille se tient près de moi, un sourire soulagé sur les lèvres. Sa peau est pâle et ses traits tirés. Il n’en dégage pourtant pas moins, une incroyable aura de bienveillance et de beauté. Ses yeux étrangement rosâtre-violine, me fixent intensément. Un carré plongeant châtain foncé, encadre un magnifique visage aux traits fins et merveilleusement bien dessinés. Voyant que je suis pleinement réveillée, elle se lève et me prend des ses bras.

Je me laisse faire, surprise. La jeune fille recule lentement et m’observe, inquiète. Elle touche mon front de sa main tiède. Je la laisse faire et la regarde attentivement. Qui est-elle? Où suis-je? Que s’est-il passé? Qui-suis je?

Mes longs cheveux blonds mouillés collent à mon visage. Je marche depuis plus d’une demi-heure sous la pluie, à chercher quelque chose. Je ne sais même pas véritablement ce que je recherche. Peut-être mon histoire? A moins ce que ce soit une raison de vivre. Je ne sais rien. Non, je ne sais plus rien. D’où je viens? Aucun idée. Mes parents? Je serais orpheline que ça ne changerait rien. Je ne connais que mon nom. Yumi. Quatre lettres capitales. Les seules dont je me souviens. A vrai dire, c’est Hana qui me les a soufflé. Hana. Cette jeune fille qui s’occupe de moi. Pour quelle raison? Cela aussi m’est inconnu. Elle passe son temps à me sourire. Pourtant, ses yeux expriment tellement de tristesse...Pourquoi? Elle m’a révélé qu’elle avait perdu une personnes très chère à ses yeux. Quelle douleur ça doit être d’être privé de sa moitié... Hana est une jeune fille très courageuse. Jamais elle n’a pleuré devant moi malgré la souffrance qu’elle ressent. Je ne sais même pas si j’en serais capable à sa place. En fait, je ne sais rien. Ma mémoire est aussi noire que les ténèbres.

Mes pas ne se stoppent que lorsque la pluie s'interrompt. Je lève les yeux. Inconsciemment, je suis retournée chez moi. Mécaniquement, je baisse la poignet et ouvre la porte. Dégoulinante, je rentre dans la pièce chaude en fermant le battant. Des pas pressés résonnent dans le couloir et Hana apparaît dans l’encadrement de la porte menant au salon. Elle se précipite vers moi et me dévisage avec de grands yeux.

Je quitte ma veste détrempée et l’accroche au porte-manteau. Mes yeux azurs se posent sur Hana. Elle me regarde toujours, une lueur de tristesse dans ses prunelles. Secouant la tête, elle me saisit par la main et me tire dans la salle de bain. Elle fait couler de l’eau et se retourna vers moi, un grand sourire aux lèvres.

Je sursaute et la dévisage, étonnée. Quel changement d’humeur! Son sourire avenant m’envoûte. Pour la première fois depuis mon réveil, je souris moi aussi. Un instant, l’idée de ne pas chercher mon passé et de reconstruire ma vie avec Hana, me traverse l’esprit. C’est idiot! Elle ne voudra jamais s’occuper indéfiniment d’une amnésique comme moi. Revenant au présent, je la regarde et lui répond :

Visiblement contente, elle s’approche de moi et me retire ma chemise et mon pantalon. Je rougis mais la laisse faire. Ses yeux violets me contemplent tandis que le feu me monte aux joues. Elle s’en aperçoit et s’excuse avant de se dévêtir à son tour. D’un signe du menton, elle me désigne la baignoire remplit. Je m’execute et plonge lentement dans l’eau chaude et moussante. Une sensation de bien-être m’enveloppe et je ferme les yeux. Hana me rejoint bien vite et s’installe à l’autre bout de la baignoire. Pendant quelques minutes, elle me transperce du regard pour finalement prendre la parole.

Je baisse les yeux devant la tristesse apparente de mon amie. Le silence perdure durant plusieurs minutes puis Hana le brise. Sa voix de soprano s’élève lentement dans la pièce pour l’emplir d’une mélodie envoûtante. Les yeux clos, elle chante doucement, presque en murmurant. Comme si le monde autour d’elle n’existait pas, elle continue de chanter. Je l’observe, stupéfaite. Cette voix, cette mélodie...Je ferme les yeux et fronce les sourcils. Mon esprit est assaillit...de souvenirs? Une douleur aigue me transperce le crâne. Je gémis et Hana arrête de chanter. Ses grands yeux rosâtres me dévisagent. Elle se penche vers moi et m’interroge du regard.

« Ce...c’est rien Hana. Juste une migraine. La rassurais-je.
-Tu es sûre? »

J'acquiesce du menton. Malgré ce que je viens de lui dire, Hana se lève et sors de l’eau. Elle enroule rapidement une serviette autour de sa poitrine et attrapant un gant, qu’elle humidifie. La tête en feu, je la rejoint, enroulée dans un peignoir. Elle pose délicatement le gant sur mon front et se retourne. Mon regard est soudenement attiré par quelque chose. Dans sa nuque, un petit tatouage est en effet dessiné. Je ne l’ai jamais vu, pour cause, elle a toujours les cheveux détachés. Je m’approche discrètement et observe la marque. Il s’agit d’une inscription en japonais. Je sursaute lorsque je reconnais le kanji signifiant mon prénom. Inconsciemment, je me détourne et relève mes cheveux. Mes yeux s’agrandissent d’avantage lorsque je découvre le kanji d’Hana dans ma nuque. La douleur de mon crâne se fait plus pressante et des flashs surgissent dans mon esprit.

Je gémis et attrape ma tête entre mes mains. Hana se précipite vers moi, affolée.

La douleur diminue lentement. Je me redresse, haletante et fixe Hana. Elle me dévisage, inquiète. Mon souffle et les battements de mon coeur finissent par reprendre leur rythme normal. Je relève la tête et observe Hana. Doucement, presque timidement, je tend la main vers elle, et lui caresse du bout des doigts la joue.

Ses yeux s’agrandissent.

Eclatant en sanglots, elle se jette sur moi. Je la serre dans mes bras. Si fort que j’en ai presque mal. Comme si j’allais la perdre une nouvelle fois. Elle sanglote de plus belle lorsque je lui murmure que je l’aime. Elle me répond qu’elle aussi et capture impatiemment mes lèvres. Des brides de souvenirs regagnent leur place pendant qu’Hana m’embrasse amoureusement.
Mon dos cambré se repose doucement sur le matelas tandis que je soupire une dernière fois de plaisir. Hana se laisse tomber à côté de moi, haletante tout comme moi. Je me penche sur elle et lui souffle à l’oreille:

Elle sourit heureuse et m’embrasse du bout des lèvres.

Un fredonnement s’élève dans la pièce. Je ferme les yeux, berçée par la voix de mon amante. Un sourire épanoui s’étire sur mes lèvres. Ses doigts glissent jusqu’aux miens pour les entrelacer. Elle se colle à moi, continuant de chanter cette mélodie si belle.
De nouveau ensemble, nous nous endormons paisiblement. Heureuses, soulagées et amoureuses.